[Deadpoule]

Je vous préviens d’avance, je n’ai pas pris autant de plaisir que j’aurai cru à écrire ce truc. Je pensais qu’avec une photo fun j’allais pouvoir écrire un truc fun comme je les aime. Mais au contraire, cette image, superbe au demeurant, était bien trop ciblée pour mon petit esprit vagabond. Du coup, plutôt qu’être assailli par des idées trop cool dans tous les sens, me voilà qui galère. Evidemment, je me rends compte maintenant qu’avec une image plus vague, mes idées auraient eu plus d’espace pour se développer.
Bref, je suis quand même content de ce que vous allez lire, pour la simple et bonne raison que je m’attendais à quelque chose de pire.
Conseil d’utilisation : lire la dernière partie sous mescaline... ou avec Papillon de Lumière en bruit de fond (ce qui devrait avoir le même effet).
Précaution d’usage : Attention, ya plein de gros mots dans ce texte !
Alors, bonne chance... et bonne nuit :

King-kong
(Culotté comme titre, n’est-ce pas ?)

On lui avait tout d’abord appris à compter. Dix tas de sucreries posés devant lui : deux tas composés de six bonbons, deux tas de trois, deux autres de cinq, puis quatre tas de deux.
Après quelques semaines d’apprentissage, il savait compter jusqu’à dix, et regroupait entre eux les tas composés du même nombre de sucreries.
Trois jours plus tard, il savait compter jusqu’à mille. Ses progrès étaient prodigieux, et nous avions donc toute confiance en ses capacités cérébrales.
C’est pourquoi, impatient comme un gosse la veille de Noël, le Professeur Carsloff décida de lui apprendre à lire. L'algèbre pouvait bien attendre.
D’abord les sons. Le Professeur Carsloff répétait inlassablement l’alphabet, dessinant au fur et à mesure les lettres correspondantes sur l’écran tactile sous les yeux concentrés de notre cobaye. Puis de nouveau, il prononçait chaque sonorité et lui demandait de pointer du doigt la lettre correspondante sur l’écran.
Deux semaines passèrent, et il était devenu capable de trouver dans une liste de mots, ceux correspondant à ses jouets préférés : le train en plastique qu’on avait sauvé du recyclage lorsque le Musée Universel avait fermé ses portes ; la radio à hautes fréquences qu’il s’amusait à démonter et à remonter pendant ses heures de repos ; ou encore le matérialisateur atomique H.S dont il se servait comme doudou, malgré les réticences du Professeur Meyer.
Train, matérialisateur, radio, peluche, tibias, strangulation, aïkido, beretta... le dictionnaire n’avait dorénavant plus aucun secret pour lui !
Et cela ne faisait que six mois qu’il était arrivé au centre ! Le Professeur Carsloff était ravi : encore quelques mois et il serait opérationnel.
A vrai dire, il ne lui manquait plus que la parole.
Pour ce point de détail, évidemment, nous devions rencontrer quelques difficultés. C’est pourquoi le Centre n’hésita pas une seule seconde, et doubla le financement du projet. Nous n’avions pas l’éternité devant nous et ça, le Président Marxwell nous le rappelait sans cesse. Alors même s’il fallait ruiner les caisses du Centre, le cobaye DEVAIT être prêt à temps !
Évidemment, même si nous étions en mesure de donner au larynx du cobaye et à sa cavité buccale la forme nécessaire pour émettre des sonorités humaines, nous avions un besoin vital de tout ce que la cybernétique pouvait nous apporter. Et même si le souvenir de ce que nous avons accomplit me hante encore aujourd’hui, nous n’avions pas le choix.
Après plus de seize aller-retour sur le billard, les résultats furent époustouflants.
Du coup, me voilà qui passait des heures assis à son chevet, me prenant de temps en temps à parler de tout et de rien avec lui. De nourriture et de jeux, la plupart du temps.
C’est après cette dernière étape dans nos recherches que les hommes de main du Centre se présentèrent au labo. Des types pas commodes, capables de vous tuer trois fois avant même que vous ne les entendiez s'approcher dans votre dos.
Entre collègues, nous les appelions les Bêtes Noires, car ils ne portaient jamais la moindre couleur sur eux autre que le noir. Attention ! Pas du gris foncé, ou du noir à reflets. Non, juste du noir. Un noir tellement... noir que ces types pouvaient se glisser dans l’ombre et s’y fondre.
Du moins c’est ce que nous avions entendu dire. Jusqu’à ce jour, les Bêtes Noires n’étaient qu’une sorte de légende urbaine qu’on se racontait entre scientifiques. Attention, si tu ne rends pas ton travail à Marxwell, les Bêtes Noires viendront te chercher.
Mais il se trouve que les Bêtes Noires existaient bel et bien. Et je n’avais jamais ressentit autant de peur que ce jour où deux Bêtes Noires vinrent chercher notre cobaye. Mon cobaye.
Lorsqu’ils l’endormirent et l’enfermèrent dans une cryo-cuve, je me rendit compte que depuis tout ce temps passé à ses côtés, je ne lui avais jamais donné de nom.
Si seulement j’avais vécu quatre mois de plus, j’aurais pu à nouveau entendre parler de lui. J’aurais même pu espérer le revoir.
Mais je suis mort bien avant.

Lorsque King-kong arracha la languette métallique de la brique, l’air s’y engouffra et la fit gonfler instantanément. Le singe apporta la brique à sa bouche puis bu goulûment.
_ Putain double K, c’est la troisième que tu t’enfiles depuis une heure !
Celui qui venait de s’adresser à King-kong avec tant de délicatesse, c’était King-rat.
_ Le jus de banane est très bon pour le corps, tu devrais le savoir !
_ Le corps, mon cul ! Moi ce qui me faut c’est un McDO, et le plus tôt sera le mieux !
Comme pour illustrer ses paroles, le rat d’un mètre quatre-vingt dix engouffra dans sa gueule une bonne grosse portion de hamburger imaginaire.
_ C'est ça ! Et tu crèveras de ton sale cholestérol avant que cet enfoiré de Llam Werx soit mort !
King-kong pointa du doigt le radar où une lueur verdâtre se déplaçait au milieu de cinq autres lueurs bien plus petites.
_ Regarde. Cet enflure se dirige vers sa cuisine, il va sûrement se faire un casse-dalle !
_ Mais pourquoi faut-il toujours qu’il se déplace avec ses foutus gardes du corps ?
King-kong se redressa pour observer son collègue, assis sur un siège pliant qui n’allait pas tarder à céder sous son poids. Le singe retroussa sa grosse lèvre inférieure comme il le fait lorsque quelqu’un vient de faire une réflexion idiote, ou d’émettre une objection mal venue :
_ Mais parce que le foie de ce type vaut plus d’un million de dollars mon grand rat adoré !
Et sur ces paroles, il tira une langue de la taille de son poing. En réponse à quoi, King-rat émit de petits couinements entre ses incisives.
_ Le foie de ce connard ? C’est tout ce qui t’intéresse ou quoi ?
_ Non, son intestin aussi. Et son pancréas pourquoi pas !
_ Y’a que son foie qui vaut du pognon espèce de cinglé !
_ C’est pas nouveau ça, tous les singes sont cinglés. C’est pas ça qui va me vexé !
_ ...
_ Héhé !
_ Inférieur !
_ ESPÈCE DE... !!!
Vue de l’extérieur, deux minutes plus tôt, ce n’était qu’un bête camion de la compagnie du gaz, stationné quatre pâtés de maisons au dessus de la planque reconnue de Llam Werx. Mais à cet instant présent, compagnie du gaz ou non, on ne voyait qu’un gros camion remuant dans tous les sens, avec à l’intérieur semblait-il, une armée de rongeurs se battant à mort contre une famille de singes, alors qu’ils n’étaient que deux à être enfermés dedans depuis quatre jours.
L’arrière du camion était assez grand pour y caser tout le matériel high-tech d’écoute et les moniteurs qui allaient avec. Mais tout cela restait bien trop petit pour une mise à mort.
King-kong, qui venait de sortir son couteau de combat faisait face à King-rat, armé d’un poing américain qu’il avait sortit de nul-part à la vitesse de l’éclair, et du bâton à décharge qu’il portait en permanence sur lui.
_ Ne redis jamais un truc pareil sale clochard ! s’exclama le singe, la lèvre inférieure retroussée comme jamais.
_ Et toi ne t’avises jamais plus de brandir ce couteau contre moi, merde !
Au lieu de répliquer à cette dernière remarque, ce que tous les deux avaient l’habitude de faire depuis quatre jours ; il se contenta de tendre sa nuque, le regard subitement attiré par le radar dans le dos de son collègue.
_ Ah non, c’est pas d’un casse-croûte qu’il s’agit.
Le rat se retourna et contempla à son tour l’écran du radar :
_ Mais par tous les égouts d'Amérique, il se barre ce con !
Le singe rangea son couteau puis s’approcha du radar pour mieux analyser la situation.
_ Je pensais que c’était un mur ça...
En effet, les six points lumineux venait de traverser ce qui était censé être un des murs de la bibliothèque, celui qui communiquait avec le salon.
_ Un putain de...
_ ... passage secret !
Les deux animaux se regardèrent :
_ Ils doivent savoir qu’on les observe !
_ Mais comment ?!
Pour toute réponse, ils entendirent un léger bruit venant du toit du camion. Tous deux, chaque sens aux aguets, levèrent les yeux.
_ Les sal...
Aussitôt après, le bruit du pare-brise que l’on brisait les fit se retourner vers le cockpit. Et simultanément, la porte arrière du camion explosa. Et avant même que King-kong ait le temps de réfléchir, une lame d’épée large comme sa taille s’enfonça dans le toit.
_ On est pas dans la merde ! s’exclama le singe.
_ Je m’occupe de l’avant, toi tu te tapes l’arrière !
_ Mais... et l’enculé avec l’épée ?
Mais King-rat courait déjà vers le cockpit du camion, son bâton à la main.
_ Ouaip ok, quand on aura le temps... puis King-kong sortit son couteau et lança une de ses grenades asphyxiantes vers la porte arrière avant que ses agresseurs aient eu la charmante idée d’en faire autant. La grenade roula sur le sol du camion puis atterrît dans le plus grand silence sur le bitume. Une seconde plus tard, King-kong entendit quelques jurons venant de l’extérieur puis la grenade explosa dans un nuage de fumée.
Les bêtes noires lui avaient appris à contrôler sa respiration pendant les deux mois que durèrent sa formation. Alors dans ce genre de situation, pas besoin de masque à oxygène ou quoi que ce soit dans le genre.
Le but de son entraînement fut principalement de pouvoir envoyer les cobayes le moins chargés possible en mission. Une ceinture autour de la taille bourrée de gadgets, une autre de part en part du buste avec leurs armes, puis la capsule de plastique au fond de la bouche : Si un cobaye été fait prisonnier, il ne devait laisser aucune trace de lui. L'ennemi ne devait en aucun cas être en mesure de tirer la moindre information de ces animaux post-améliorés, que ce soit sur leur patron, le but exact de leur mission ou encore la technologie qui avait fait d’eux les rois des animaux.
Dans le fumée provoquée par la bombe asphyxiante, un être humain qui n’était pas équipé du matériel adéquate était aussi aveugle qu’un nouveau né. Mais pas King-kong, à qui on avait implanté dans la rétine une dizaine de lentilles aux capacités distinctes.
Tout ce qu’il savait de ces lentilles, ce qu’il avait dû rester éveillé pour que l’on les lui implante. Heureusement, il n’avait gardé aucun souvenir de l’opération.
King-rat, quant à lui, avait subit plus d’une cinquantaine d’opérations similaires, et il lui avait juré à plusieurs reprises que toutes ces opérations étaient des plus douloureuses possible. Que tous les cobayes avaient frôlé la mort à chacune d’elles. Que leur cerveau ne l’avait pas supporté et qu’il en avait effacer toutes les traces.
Bref, ses lentilles thermo-réactives lui permirent de repérer trois hommes perdus dans la fumée. L’instant d’après, le singe brisa la nuque de deux d’entre eux puis s’apprêta à s’occuper du dernier, mais déjà la fumée s’était dissipée.
Le troisième homme resta abasourdi lorsqu’il aperçut un singe d’un mètre soixante-dix armé jusqu’aux dents, s’élancer vers lui sur ses pattes arrières. Puis il n’aperçut plus rien du tout, puisqu’une lame longue de cinquante centimètres venait de se frayer un chemin entre ses deux yeux.
A l’aide du neurotransmetteur qu’on lui avait greffé dans la partie droite du cerveau, King-rat s’adressa à son frère d’armes :
_ Tu t’en sors, macaque ?
_ Ouaip ! On s’occupe du mec à l’épée ?
_ Déjà fait !
Le singe se retourna vers le camion, puis observa le toit. Une rigole de sang se déversait le long de la carlingue. Puis il aperçut l’ombre du rat, tenant fièrement l’épée de son adversaire terrassé. Le roi des égouts atterrit sur le trottoir, sortit sa langue violacée et lécha l’épée ensanglantée puis, un sourire de satiété dessiné sur ses lèvres, tendit l’arme à nouveau immaculée vers King-kong.
_ Putain d’amateurs !
King-kong voulut répondre mais une gigantesque explosion retentit dans tout le quartier.
Instantanément, le rat et le singe se dirigèrent avec hâte vers l’avant du camion ; balayèrent du revers de la main les débris de glace qui juchaient les siège puis entreprirent de mettre le contact. Mais évidemment les hommes de mains de Werx, aussi amateurs qu’ils étaient, avaient pensé à bousiller le démarreur.
_ Les enflures !
_ Ils étaient là que pour nous ralentir !
Et sur ces mots, tous deux sprintèrent à travers les rues, dans la direction de l’explosion.
Comme ils s’en doutaient, Werx avait fait sauter son manoir. Des flammes de plusieurs mètres de hauteurs balayaient alors le bâtiment en ruine, et la chaleur presque suffocante aurait dû au moins faire tousser les deux soldats si seulement on ne leur avait pas greffés des filtres en acier dans le larynx et l’oesophage.
King-rat observa l’incendie qui ravageait le terrain, prit sa respiration et traversa les flammes en courant.
_ Attends gros con, Werx est à MOI !
Mais il était trop tard, et la silhouette du rat géant se perdit dans l’enfer du brasier.
King-kong n’aimait pas du tout la tournure que prenaient les évenements. Il s’agissait de sa première mission, ce qui était loin d’être le cas de son camarade. Et il tenait plus que tout à en récolter tous les lauriers. Mais c’était une évidence : les rats avaient un instinct de survie bien plus développé que celui des singes, et maintenant son frère d’armes avait une longueur d’avance.
Dépité, le roi des singes dû se rendre à l’évidence. S’il voulait sortir victorieux de cette mission, il allait devoir prendre le même chemin.

Le pelage de King-kong n’était guère plus qu’une fine pellicule de poils et de chaire carbonisée lorsqu’il trouva le passage secret qu’avaient traversé Werx et ses gardes du corps. La plupart des lentilles implantées dans ses rétines avaient en partie fondue et le singe ne voyait presque plus rien, mais il continuait d’avancer, trébuchant sur les cadavres de la garde personnelle de sa cible, laissés par King-rat sur son sillage.
Soudain, King-kong intercepta le vacarme assourdissant d’une lutte, une dizaine de mètres... quelque part autour de lui. Et il se surprit à frissonner.
N’avait-il pas été entraîné pour ne jamais ressentir peur ? L’implant sous-cutané qu’il possédait sur le torse n’était-il pas censé lui injecté de l’adrénaline et de la morphine toutes les deux minutes pour le booster ? Alors comment pouvait-il au moment fatidique, à l’instant le plus important de son existence d’animal, douter de l’issue d’une confrontation ?
Néanmoins, malgré le doute, la crainte et la douleur de ses brûlure au cinquième degrés (pour les plus superficielles d’entre elles), le singe continua sa route, tâchant de tendre l’oreille (seule celle de gauche avait survécue à sa traversée des flammes) afin de se diriger le plus promptement possible vers la source du bruit.
Lorsqu’il cru toucher au but, la bataille avait cessé, il n’y avait plus un bruit. Sauf...
_ Te voilà enfin Cobaye 00040222 !
_ C’est toi Werx, enfoiré de fils de pute ?!
_ Moi-même. Et si tu pouvais encore voir quoi que ce soit, tu aurais le privilège d’observer le cadavre de ce rat d’égout.
Effectivement Werx, ombre massive au centre d’une pièce plongée dans l’obscurité, se tenait debout à côté du corps de King-rat lacéré de toute part, l’épée qu’il avait arraché à sa précédente victime plantée entre ses deux omoplates.
Mais le diagnostique de Werx quant à l’état de King-kong n’était pas exact. Pas tout à fait du moins. Car King-kong voyait encore (un peu dirons-nous)
_ Rapproche-toi sale enfoiré, que je puisse voir ta tronche !
Et Werx s'exécuta, un rire sadique, gras et pesant s’extirpant d’une cage thoracique sans aucun doute sur-développée.
_ Mouahahahahahah !
Voilà pour le rire sadique.
_ Et maintenant, petit soldat simiesque ? A qui revient l’honneur de distribuer les premières claques ?
King-kong dû faire un effort de concentration afin de discerner les différents contrastes qui se présentaient à sa vue déficiente. Puis alors qu’il parvenait à faire la mise au point, il poussa un cri de stupéfaction :
_ Putain, un gorille !
_ Ah non, on me la fait pas à moi ! Tu veux sûrement que je me retourne et que...
_ Non espèce de connard, je parlais de toi !
_ Ah oui, j’oublie tout le temps !
King-kong se trouvait donc face à un imposant gorille de deux mètres douze.
_ Mais tu n’es pas... tu peux pas être Werx ?!
_ Et pourquoi ça ? Après tout, aucun service secret n’a jamais eu en sa possession la moindre photo de moi, alors...
_ Tu es... comme nous ?
_ Oui ! Et tu peux m’appeler KING-KONG !
Sur ces mots, la lèvres inférieure du singe se retroussa et il brandit son couteau de chasse.
_ Tu rigoles ? C’est MOI King-kong !
Puis il arqua ses pattes arrières, prêt à foncer sur Werx lorsque quelque chose dans le dos du roi des gorilles retint son attention :
_ C’est quoi ça derrière toi ? lui demanda le roi des singes.
_ Oh non, pas deux fois quand même !
_ Je déconne pas. On dirait un hologramme...
_ Ah, ça...
En effet, dans son dos se trouvait un hologramme. Et King-kong (le petit singe, pas le gros con) cru reconnaître le Président Marxwell.
_ Ca c’est moi. Je suis en train de faire un discours télévisé.
_ Le Président Marxwell...
_ Bon, mon hologramme a quand même plus de gueule que moi. Il faut dire que les contribuables refuseraient de payer leurs impôts s’ils savaient qu’un gorille issue d’une espèce en voie de disparition les gouvernait.
_ Tu es le Président... ?
_ Putain ce que le cerveau des Cobayes peut être lent à la détente ! s’écria-t-il en plaquant une grosse patte sur son visage.
_ Mais j’avoue que ça doit être très compliqué pour ton petit cerveau de faire le tri dans toutes ces explications.
Le singe lui, s’en moquait royalement. Président ou pas président, gorille ou pas gorille, il avait une mission à accomplir. Il sauta sur le mur deux ou trois mètres sur sa gauche, puis se servit de ses deux pattes postérieures pour bondir avec plus de force vers son ennemi.
Une esquive et une clé plus tard, le roi des singes était à terre, désarmé, et la patte qui tenait son couteau une seconde plus tôt coincée derrière son dos par l’une des grosses paluches de Werx.
_ A croire que tu a séché tous tes cours de logique au centre. Sais-tu au moins ce que c’est qu’un anagramme ?
_ Je sais pas moi, une putain de technique de combat qu’on aurait oublié de m’apprendre ?
_ Non. C’est quand on met les lettres d’un mot ou d’une phrase dans le désordre pour obtenir un mot ou une phrase différente.
_ Et alors ? C’est pas en sachant que niche ça donne chien, que je vais te latter la gueule !
_ Ca c’est sûr...
Puis il se remit à rire.
_ Un anagramme, c’est le genre de truc qui différencie les humains des animaux. Le genre de truc que l’on ne vous a jamais appris au centre histoire que vous veniez pas me faire chier.
_ Bah c’est raté, face de slip !
_ Je sais. Même si cela dépasse l’entendement, toi et ton ami avaient retrouvé ma trace, malgré les ordres formels de vos supérieurs !
_ King-turtle, ce bec à foin ?
_ Oui, ainsi que King-weasel et les autres. Bref, on s’en fout. Je vais te péter le bras, puis ensuite je t’enfoncerai ton petit canif dans la gorge. Et j’observerai le sang couler à gros bouillon sur ton torse carbonisé. Mouahahahahahah !!!
Ce qu’il fit aussitôt après.

Le soleil se levait lorsque les pompiers parvinrent enfin à maîtriser l’incendie. Dans les décombres, il ne restait plus rien d’intact, mise à part le matériel high-tech qui se trouvait dans la cave du manoir, seulement accessible par un passage secret.
Le camion de pompier resta stationné toute la journée devant les ruines encore fumantes, et pas un seul des pompiers qui s’étaient déplacés ne sortirent des décombres. Tous morts. Car les Bêtes Noires étaient là. Arrivées sur les lieux bien avant l’arrivée des soldats du feu, à peine plus de dix minutes après que le vrai et grand King-kong en ait eu fini avec feu le roi des singes. Les Bêtes Noires, au nombre de deux (car toujours par deux elles sont), se dirigèrent d’un pas nonchalant vers le passage secret, laissant derrière elles une traînée de cadavres en cirés.
Lorsqu’elles se trouvèrent dans la salle de l'hologramme, le roi des gorilles batifolait dans les viscères et les tripes du singe.
_ Votre mission est terminée Werx.
_ ‘ommen ‘a ?
Le gorille se reprit aussitôt et recracha la colonne vertébrale de King-rat qu’il était en train de ronger.
_ Hum, comment ça ? Je commençais à peine à m’amuser !
_ Nous nous sommes occupés des chercheurs du centre, et les Cobayes ont enfin tous été exterminés. Nous allons repartir maintenant.
King-kong tressaillît. La présence des Bêtes Noires l’avait toujours mis mal à l’aise.
_ O-okay. Et moi dans tout ça ?
Les deux Bêtes Noires s’observèrent avec amusement. Si au moins on pouvait lire de l’amusement ou quoi que ce soit d’autre dans l’amas d’ombre plasmique qui leur servait de visage. Disons que leurs épaules se soulevaient et se rabaissaient avec saccades, comme s’ils se fendaient la poire.
L’une des deux Bêtes Noires tendit une main squelettique vers King-kong.
_ Au revoir Werx.
Et Werx disparut. Ne laissant à sa place qu’un petit bébé gorille partiellement embêté.
_ 294032224052, veuillez éteindre l'hologramme je vous prie. Ce système archaïque de communication pirate est en train d’épuiser toutes les réserves du vaisseau.
Alors l’autre Bête Noire se dirigea vers le tableau de commande et appuya sur un bouton. Aussitôt, l'hologramme de Marxwell se volatilisa.
_ Et maintenant, si vous aviez l’amabilité d’actionner les réacteurs de secours, nous pourrions décoller au plus vite.
Dix secondes se passèrent et après quelques bips vains, 294032224052 s’adressa à l’autre Bête Noire :
_ Pardon, je vous prie de m’excuser très cher 742617000027, mais je crois qu’il ne reste plus que deux réacteurs de secours sur les cinq.
_ Mais quelle espèce sous-développée ! Etaient-ils obligés de tout faire exploser ainsi, je vous le demande ?
_ Je ne pense pas cher ami. Mais nous allons devoir faire avec.
_ Eh bien soit. Nous ne pourrons que retenir une bonne leçon de cette excursion ici-bas.
_ Tout à fait.
Puis deux gigantesques jets enflammés carbonisèrent le pâté de maison avant que la terre ne tremble et qu’une gigantesque masse de boues, de bétons, de canalisations, de briques, et de matières inconnues sur cette planète ne s’extirpe avec grâce du sol et se dirige vers le ciel.
Pour disparaître à jamais.

Zi end !

Voilà... vous avez pas tout compris, hein ? Eh bah moi non plus

Et hop,