Je me permets...

[Deadpoule]

Merci de ton comm et de ton message sur mon tableau de bord ^^
Merci à Thoor aussi !
Je posterai un ou deux autres textes dans les jours à venir (mais des trucs plus soft quand meme)

Et hop,

[Thoor]

a ton service

[Deadpoule]

Oh ? OK !
Alors je voudrai de super critiques ditirembiques pour les deux prochains textes que je posterai ^^ (une page chacune minimum !)

[Thoor]

Chiche

[Deadpoule]

J'adore ^^

[Hilarion]

Du suspens, de l'ironie, le sens de la formule : bravo!

Et (re)vive le Caporal Thunder Buzz!

[Deadpoule]

Merci Monseigneur ^^ (et merci pour la billboard )

J'en poste un nouveau. Point de Caporal Thunder Buzz dans celui-ci, mais un modeste hommage à Terry Pratchett. Vous m'en direz des nouvelles.

La Maison de Retraite

Ont été recensés un certain nombre de lieux où nous sommes à peu près sûrs de rencontrer La Mort. En tête de liste on trouve les grands restaurants français londoniens et les stades de foot anglais. La Mort adore l’Angleterre.
Il peut aussi vous arriver de croiser La Mort dans quelques pubs anglais certains soirs de la saint Sylvestre.
Petit souvenir de l’année dernière :
La Mort était sagement accoudé au comptoir de ce charmant petit coin de paradis perdu au bord de l’autoroute quelque part près de Liverpool. Le lieu s’appelait The Harmfull et il faisait nuit noire. Autant dire que l’endroit était mal choisit pour fêter la nouvelle année dans la joie et la bonne humeur. Donc La Mort était assis au bar (et j’insiste sur « assis » car La Mort est un mâle. Un mâle nécessaire) et Il écoutait un vieil ivrogne d’une trentaine d’années qui entamait sa dix-septième Guinness.
_ Alors comme ça vous êtes chauffeur routier ?
_ ouais, hips… et même que mon camion l’est garé dev… devant…
_ Mais vous n’êtes pas auprès de votre famille en ce soir de réveillon ?
_ Bha nan, hips… c’est qu’y faut bien travailler pour ga… hips, gagner sa croûte !
Puis se retournant vers son interlocuteur drapé de noir :
_ Et vous… hips… ‘faites quoi dans vot’ vie ?
La Mort se fendit d’un sourire, si on peut appeler ‘sourire’ l’action d’espacer de quelques centimètres deux mâchoires dénuées de chaires et de lèvres :
_ Je raye des noms sur une liste.
_ Rrrrrrrrooooo ??!
_ Et si ! Et vous savez quoi ?
_ Nan ? demanda l’ivrogne en faisant signe au barman, ravi, de lui apporter une autre bière.
_ Eh bha, figurez-vous que seuls les gens qui vont bientôt mourir peuvent me voir !
_ Pa… passionnant… fit l’autre tout en hochant la tête. Bon bha c’est pas tout ça, mais, hips… faut que je term… tern… finisse ma tournée !
La Mort prit une voix paternelle :
_ Oh mais j’espérais que vous alliez dormir dans votre camion cette nuit, vu votre état.
Mais comme s’il ne l’entendait pas, l’homme finit cul sec sa dix-huitième Guinness et se dirigea vers la sortie en titubant.
Sur ce, La Mort sourit de nouveau et sortit de sa manche gauche une longue feuille de papier jaunie et froissée. Puis d’un trait de plume, Il raya une ligne sur la feuille.
La Mort l’appelle sa « liste de course ».

Mais bon, La Mort ne travaille pas non plus tous les jours. Et lorsque sa liste de course n’est pas trop chargée (ou que Manchester United ne reçoit pas à domicile), La Mort se rend dans un endroit sympa, histoire de passer le temps en charmante compagnie, de se la couler douce et de pas trop se prendre la crâne. Cet endroit c’est la maison de retraite du duc de Whinsfrey.
L’endroit idéal où allier travail et plaisir !
Nous préciserons ici que jamais un seul duc de Whinsfrey n’a mit les pieds dans cette maison de retraite, et d’ailleurs, pas un seul non plus n’en est ressortit. D’un autre côté, personne n’en est jamais vraiment ressortit, mis à part les employés et les visiteurs. La maison de retraite du duc de Whinsfrey se nomme ainsi car ce nom sonne bien. On n’est même pas sûr qu’un seul duc de Whinsfrey n’ait existé un jour.

Et donc, il y a deux ans déjà, La Mort patientait dans le hall d’accueil de l’établissement, accoudé au bureau de l’hôtesse, en train de tapoter avec ses petits doigts osseux sur le bois vernis et désinfecté.
Sur le coup de l’impatience, Il toussota. Puis :
_ Dites-moi, vous pouvez vraiment pas m’entendre ?!
L’hôtesse d’accueil ne daignait pas lever ses yeux de l’ordinateur. Elle tapotait du courrier administratif en mâchonnant du chocolat. La Mort haussa un sourcil, se souvenu qu’Il n’en avait plus puis prit appuis avec ses coudes sur le bureau afin de voir ce qu’il y avait de l’autre côté.
_ Regardez-moi un peu toutes ces tablettes de chocolat et ces emballage vides ! Avec ça, m’étonnerait pas que d’ici six ou sept mois on taillera un brin de causette ensemble ma petite.
Sur ce, Il se redressa et s’en alla en sifflotant vers la salle de récréation, adjacente au hall d’accueil. Là-bas Il retrouverait quelques connaissances.
La salle de récréation était munie de plusieurs rangées de chaises en plastique et d’un petit meuble vissé dans un coin de la pièce. Sur le meuble, la télé. Sur la télé, encore un soap pour vieilles personnes.
Une demie douzaine de joyeux pensionnaires étaient assis à leur place habituelle et observaient d’un œil quelque peu sceptique la vie de tous les jours qui défilait dans l’écran de télé.
La Mort s’assit à côté de Maryline, 76 ans, contempla l’écran quelques secondes afin de se plonger un peu dans le scénario et chuchota à l’oreille de sa voisine :
_ Ne croyez pas ce que raconte Jack, c’est un menteur doublé d’un meurtrier !
Maryline se retourna sur lui et le dévisagea en plissant les yeux. Tout son visage, ridé et appauvrit par l’âge, était l’illustration d’une vie de veuve passée à regarder des soap pour vieilles personnes à la télé. Sauf que maintenant elle les regardait ici, dans la salle de récréation de la maison de retraite du duc de Whinsfrey.
_ Je savais DEJA tout ça, lui répondit-elle, agacée.
_ Ah…
Puis elle se retourna vers la télé en disant :
_ Mon mari a écrit cet épisode. Ainsi que les 5815 autres, vous devriez le savoir chère madame !
Ces mots frappèrent de plein fouet La Mort qui fronça les arcades sourcilières et se pencha de nouveau sur la vieille femme :
_ Heu… vous avez bien dit « madame » ?
Maryline se tourna une nouvelle fois vers son voisin et l’observa comme on observe un lampadaire qui nous demanderait l’heure :
_ Bien sûr que oui, vous êtes La Mort n’est-ce pas ?
_ Oui, mais… je suis un… oh, comme c’est gênant de dire cela… mais…
_ Oh vous allez accoucher ou non ? lui chuchota-t-elle, irritée.
_ Je suis un mâle, enfin voyez-vous… pas une dame.
Maryline rajusta ses lunettes et scruta d’un peu plus près son visage.
_ Ah oui… peut-être bien. Mais bon, voudriez-vous me laisser suivre s’il vous plait ?
La Mort parut réfléchir à sa demande, puis Il lui dit :
_ … je croyez que votre mari écrivait cette série ? Vous en connaissez déjà la suite, non ?
_ Et moi je pensais que vous vous trimballiez avec votre faux partout où vous alliez ! Et pourtant je n’en fais pas tout un plat !
Elle fixa La Mort quelque secondes :
_ Et d’ailleurs, vous l’avez mise où, votre faux ?
La Mort baissa instantanément les orbites et entreprit de lisser un pli sur sa robe que seul lui semblait voir :
_ Aux clous… répondit-il.
_ Hein ?
_ Bha ouais, j’ai perdu un pari avec La Famine et du coup j’ai une sacrée dette envers Lui !
Maryline qui ne paraissait plus trop s’intéresser à la discussion, s’était retournée vers la télé, replongée dans son feuilleton.
La Mort quant à lui, sortit sa liste de course de sa manche gauche et lut les noms qui y étaient annotés. Maryline, mine de rien, tenta d’y jeter un coup d’œil mais La Mort s’en rendit compte et partit s’asseoir deux sièges plus loin. Sa liste était courte, Il allait pouvoir faire vite.

Il se leva et se dirigea vers la chambre 162 où on avait placé le vieux Joe. De son lit d’un blanc qui aurait fait plisser les yeux de La Mort s’Il avait encore eut des paupières, s’extirpaient des tubes de perfusions emplis de liquide médicaux et de sang. Le vieil homme au visage émacié gardait les yeux fermés. Son teint était grisâtre comme si son corps comprenait ce qui était en train de lui arriver et qu’il se résignait déjà. Sur la table de chevet, il y avait une bible.
La Mort tira une chaise et s’assit juste à côté du lit.
_ Tss-tss, la bible… tu n’as vraiment rien de mieux à lire ?
Les yeux du vieux Joe s’ouvrirent peu à peu et son visage s’éclaira lorsqu’il vit qui était venu lui rendre une petite visite.
_ Oh, bonjour toi…
Il parlait doucement, comme si le moindre mot attaquait sa gorge comme du papier de verre.
_ Alors donc, tu es enfin venu faire ton travail.
Ce n’était pas une question, mais bien une affirmation ; suivie d’un soupir de soulagement.
_ Désolé, j’ai pas emmené de cartes avec moi cette fois, répondit La Mort. Il se pencha sur le lit et dit au vieux Joe sur le ton de la confidence :
_ Tu sais ce que dit Pulitzer à Saint Pierre lorsqu’il arrive au paradis ?
_ Te fatigues pas je la connais celle-la… le vieil homme reprit son souffle puis continua :
_ « Sympa votre bouquin. Mais faire revenir votre héro dans le deuxième tome, il faudrait revoir ça »
Ils rigolèrent tous les deux puis La Mort extirpa sa besogne de sa manche.
_ La voilà, ta fameuse liste ? demanda le vieux Joe.
Comme seule réponse, La Mort déroula le papier et brandit sa plume.
_ Un dernier mot, Joe ?
Ce dernier regarda la liste, puis la plume, puis la capuche au fond de laquelle se trouvait le visage de son interlocuteur puis, d’une petite voix, il demanda :
_ Je peux ?
La Mort observa sa liste de course :
_ Bha, c’est pas très conventionnel et…je risque de me faire taper sur les doigts s’ils apprennent ça mais bon, ok…
Sur ces mots, Il posa sa plume dans les mains du vieil homme et installa la liste bien face à lui.
_ Vas-y, Joe.
D’un doigt osseux, Il désigna au vieil homme la ligne où se trouvait son nom.
_ Je raye, c’est ça ?
La Mort hocha la tête. Le vieux Joe avança sa main vers la feuille. Elle se mit à trembler à mesure qu’elle se rapprochait. Puis la plume rencontra le papier, et l’encre ratura le nom de Johnny Mcguire.
Et, alors que la tête du défunt basculait en arrière, La Mort prit sa main doucement, et ramassa la plume et la liste. Les instruments électroniques poussèrent de petits bruits plaintifs et quelques secondes plus tard, une toute jeune infirmière accourut dans la chambre.
La Mort s’était éloigné du lit et observait la scène en silence. Puis Il contempla la jeune infirmière qui s’activait dans la chambre sans faire attention à lui.
_ Vous ne me voyez pas je suppose ?
Aucune réponse de la part de l’infirmière qui débranchait les perfusions des bras du vieux Joe.
La Mort continua malgré tout de s’adresser à elle, non sans une profonde lassitude dans la voix :
_ Oh, je crois déceler une forte concentration de goudrons dans vos poumons chère jeune fille.
Puis, Il sentit peser sur lui tout le poids des vies qui se trouvaient dans cette maison de retraite. Il sentait son dos se voûter, Il était fatigué.
_ C’est que… un jour vous pourrez me voir et me… parler. Et ce jour là, ce jour où je ne serais plus invisible à vos yeux et où vous pourrez me porter de l’attention… ce jour là sera le jour où je viendrai vous chercher…
Son travail terminé, la jeune femme quitta la chambre pour se rendre à l’accueil où elle préviendrai la famille du vieux Joe. S'il en avait encore.
La chambre était vide, mise à part le corps du vieux Joe. Mais La Mort continua de parler dans le vide :
_ Oui, je viendrai vous chercher malgré tout… comme tellement d’autres personnes avant vous… et comme tant d’autres par la suite…

La Mort quitta la maison de retraite et se dirigea vers le parking où Il avait attaché son cheval. Il se posta devant celui-ci et sortit de sa manche sa liste funèbre afin de vérifier qui était le prochain.
_ Oh non ! Pas encore lui !! Ce mage raté me fait vraiment perdre mon temps !
Puis Il monta sur le cheval et lui demanda d’avancer. L’animal tout en os s’exécuta mais quelques mètres plus loin, Il ralentit et son échine tremblota quelque peu.
_ Et toi, ne commences pas à te plaindre de tes rhumatismes ! Si tu flanches une fois de plus, va encore falloir que je demande à La Guerre de venir nous dépanner !

[KING MOB]

Et en plus il lit Pratchett... la meilleure poule du monde moi je dis

En plus c'est bien écrit tout ça tout ça...

[Deadpoule]

Eh bien, le temps que tu lises ça, j'étais en train de corriger ma conjugaison des passé-composé (ée à la fin d'un verbe concernant la Mort, mais où va le monde ?) ^^

[grogramane]

la mort:"un male necessaire"... tres jolie formule

[Thoor]

hmm, hmm ( raclement de gorge du gars qui va parler longuement )


Tout d'abord j'ai bien aimé. Le style tout en douceur, avec une histoire tendre et un personnage attachant.

N'ayant pas lu Pratchett ( plus par manque d'occasions que par manque de volonté), j'ai peur d'avoir manquer une ou deux références, mais
rien de bien grave

Dernier point; j'aurai choisit un autre titre

voilou voilou

[Deadpoule]

	Citation:
	la mort:"un male necessaire"... tres jolie formule

Rendons à César ce qui lui appartient et d'ailleurs par la même occasion, faisons echos à ce que tu as mis sur mon billboard ^^
Cette formule est © Terry Pratchett l'auteur du Disque Monde Dans ce gigantesque tas d'ouvrages tous plus délirants les uns que les autres, on retrouve Rincevent, un mage raté qui a eu le malheur d'entrevoire le Huitième Sortilège (tadaaa!) - ce dernier s'est jeté du grimoire dans lequel il se trouvait bien décidé à squater le cerveau du mage... l'empêchant d'en apprendre un seul de plus !
Bref, voilà qui répond à tes deux questions ^^
Et en plus j'éclaire Thoor par la même occasion !

	Citation:			Posté par Thoor
	Dernier point; j'aurai choisit un autre titre voilou voilou

Alors pour ce point : je suis tout à fait ok avec toi ! Non de dieu !
Mais bon c'est le jeu ma pov' Lucette !
C'est à dire que j'ai écrit ce texte à partir de l'atelier lecture d'un forum. Le but était d'écrire un texte dont le thème était la mort, le titre "La Maison de Retraite" et qui comporterait une Bible. Alors si avec ça j'avais encore le choix... ^^
Ps : tu m'as pas fait une page

Dernière réference intéressante que les neophyte ont pu raté : La Mort est aussi un personnage omniprésent de la saga du Disque Monde. Il a à peu de chose près le même caractère que ce qui est décrit dans mon tit texte, avec son flegme légendaire. Et on retrouve aussi une fois ou deux ces camarades à cheval (La Famine, La Peste et la Guerre) Lui et Rincevent se sont croisés plus d'une fois. Le genre de dialogue que l'on peut lire entre eux :
- Ca faisait longtemps la Mort ! Tu m'as manqué !
- De peu, Rincevent. De peu...


Et hop,

[Ben Wawe]

Très bon, bravo. Je trouve que tu as un humour et un style très anglais : décalé, vraiment drôle, moqueur mais en même temps tendre avec ses cibles. Je suis plongé en ce moment dans un pavé rempli de telles choses, et c'est marrant de retrouver ça ici !
Oui, j'aime bien, vraiment. J'ai parfois du mal à de tels retours réguliers à la ligne, mais ça participe bien à la structure de ton récit (alors que pour le premier que tu as posté, ça le faisait moins, je trouve). Bravo à toi, c'est vraiment bien fait.

[Deadpoule]

	Citation:			Posté par Ben Wawe
	Je suis plongé en ce moment dans un pavé rempli de telles choses, et c'est marrant de retrouver ça ici !

Ah ? Et c'est quoi ce livre ?
Perso, mes références dans ce domaines restent Douglas Adams, Matt Ruff, Terry Pratchett, Frederick Brown... Et pis dans un tout autre domaine, Bret Easton Ellis, Chuck Palanhiuck, Lolita Pill, Beigbeder, Jay McInerney... la nouvelle vague américaine des années 90 en quelques sortes et leurs émules

	Citation:			Posté par Ben Wawe
	J'ai parfois du mal à de tels retours réguliers à la ligne, mais ça participe bien à la structure de ton récit (alors que pour le premier que tu as posté, ça le faisait moins, je trouve).

Ah enfin une critique correctrice ^^ Que veux-tu dire par là ? Ca casse le rythme du récit trop de passages à la ligne ?

	Citation:			Posté par Ben Wawe
	Bravo à toi, c'est vraiment bien fait.

Merci beaucoup ^^
Ca fait plaisir

Bon histoire d'épuiser encore un peu mon stock de textes fun, je vais en poster un autre...

En Pleine Croissance

Depuis 2156, le Hard-ball fait un malheur auprès des jeunes.
Mélangeant l’antique Basket-ball et le Hand-ball toujours à la mode, le Hard-ball se joue à seize contre seize. Chaque équipe est munie d’un Projectile ; une balle d’apparence proche du ballon de basket, même poids, même densité, même forme, mais recouverte de latex. L’un des projectiles est rouge et l’autre bleu. Les goals, munis d’un jet-pack doivent protéger leur filet tendu dix mètres au dessus du terrain. Et le but est d’envoyer son projectile dans le filet adverse.
Le jeu est rapide, violent et exaltant, selon les spécialistes. La première équipe qui arrive à placer trois filets remporte un round. Au bout de trois rounds remportés, la confrontation prend fin.

Lorsque Rank, mon fils, dossard numéro douze, place le premier projectile de la partie, je me lève presque instantanément. J’ai beaucoup travaillé ce rôle. Le sourire aux lèvres j’applaudis à tout rompre. Rank se tourne vers moi, reste un instant interdit puis son regard s’illumine. Il y a certainement de quoi être fier : en ouvrant le score, il rapproche son équipe de la victoire. Mieux encore, il est enfin parvenu à attirer mon attention ! Moi, Jord Tennessee, l’illustre maire de Dallas, et futur sénateur du Texas ! Ce qui représente un exercice extrêmement difficile à accomplir pour mon propre fils, je suis forcé de l’avouer.

Il reste tourné vers le public pendant une durée qui me semble s’étirer exagérément dans le temps, j’ai les bras qui commencent à fatiguer, les paumes de mes mains quelque peu irritées à force d’applaudir.
Puis son entraîneur lui cri quelque chose de l’autre bout de l’arène et il se rend enfin compte que le jeu a reprit depuis dix bonnes secondes.
Il secoue alors la tête et se replonge dans la partie.
Pendant une poignée de secondes, je reste immobile dans mon attitude, le sourire figé, les mains toujours tendues en avant. Et lorsque Rank se retourne et cours vers ses camarades, j’efface instantanément mon sourire idiot et me rassoit avec grâce.
Impassible, me revoilà à suivre plus ou moins le match. Puis sans m’en rendre vraiment compte, je me remet à calculer.

Rank est un jeune adolescent de 17 ans et son corps grandit. Résultat : son dos est fragile, ses cuisses sont fragiles, sa colonne vertébrale est fragile, ses tendons et ses articulations aussi.
Et le Hard-ball n’est pas un sport pour les faibles.
Depuis quatre ans le gouvernement martien lui paye ses études, et depuis six mois, il joue en Planétaire.
Si je fais bien mes comptes, cette petite aberration généalogique me doit plus de trente millions de crédits en frais d’hospitalisation !

Non vraiment, le Hard-ball n’est pas un sport pour les faibles. Et aussi doué soit-il, son organisme ne peut résolument pas supporter toutes les maltraitances exigées par ce sport de sauvage !

Comme si la refonte de ses articulations n’avaient pas suffit, on a dû faire couler de l’Adamantium dans ses os à la suite du championnat inter-planètes. Ça c’était il y a deux ans. Six moi plus tard à la suite d’une fracture ouverte, il a dit au revoir à son fémur droit, que les médecins ont remplacé par une prothèse cybernétique. Un gadget high-tech qui à lui seul, m’a coûté une véritable fortune.
Il y a aussi eu la reconstruction complète des métacarpes de sa main droite, les plaques de carbone pour solidifier sa colonne vertébrale, les omoplates ressoudés, la synthétisation de ses tendons d’achille. Ça, ce fut à trois reprises. Et, cerise sur le gâteau, j’ai dû lui offrir un élevage complet de clones afin de remplacer la quasi-totalité du système musculaire de ses deux bras, ainsi que ses reins, son foie et ses poumons. Opérations qui furent toutes aussi efficaces pour sauver Rank que pour ruiner mon compte en banque !

Et malgré tous ces investissements, malgré tous ces soins prodigués, ces heures passées à négocier avec mon comptable pour faire passer les frais au nom de la ville, malgré toute cette satanée fortune dépensée : cette petite peste, cet infâme petit ingrat continue le Hard-ball !
Comme s’il passait son temps à me narguer : il bondit à des hauteurs démesurées pour marquer des filets, s’accroche aux jet-pack des goals adverses, rentre dans chaque mêlée, et se bat avec les joueurs adverses et les hooligans qui envahissent le terrain quasiment à chaque match !
Je vais vite devoir trouver une solution radicale pour diminuer ces coûts qui, avec le temps, deviennent de plus en plus vertigineux.

Rank, comme mue par mes pensées, marque un second filet. Puis, après une chute de six mètres de hauteurs, il atterrit lourdement sur le genou droit dans un affreux craquement d’os.
Sale petit con !
Fier de lui et miraculeusement indemne, il se relève et se retourne vers moi les yeux pleins d'espoir. On dirait vraiment qu’il me nargue ! Instantanément, je prends sur moi puis me redresse et j’applaudis à tout rompre.
Dans ma mise en scène, je n’oublie pas d’observer du coin de l’oeil les drônes caméras qui filment chaque angle de l’arène. Plus d’un milliers de chaînes terrestres et près de deux cent chaînes martiennes diffusent en direct ce match. Des milliards de téléspectateurs.
Je sens bien que je vais devoir feindre l’amour paternel à chaque fois que ce petit animal frôlera l’accident pour les quatre-vingt dix prochaines minutes. Mon siège de Sénateur en dépend !
Lorsqu’un drône passe à proximité, je me pare de mon plus beau sourire. Père aimant. Famille soudée. Amour paternel. Une parfaite couverture médiatique.
Mais tout en jouant la comédie, je me fais une promesse : au prochain accident, je me débarrasserai de mon fils.
C’est le troisième clone que je produit ! Mais on ne m’y reprendra plus : la prochaine fois je commanderai un androïde dépourvu de croissance spontanée !

Et hop,

[Ben Wawe]

Je lis en ce moment Jonathan Strange & Mr Norrell de Susanna Clarke, pavé de plus de 800 pages sur deux magiciens début XIXe en Angleterre qui veulent restaurer la magie anglaise, disparue depuis des siècles et l'absence des grands magiciens. C'est très fun, drôle, fantastique et bien documenté avec un univers qui se créé au gré des pages et des références.
Pour ce qui est des retours à la ligne, je trouve que ça casse parfois le rythme et que ça n'est pas toujours nécessaire : même si j'ai horreur des gros pavés de texte, je ne trouve pas ça toujours très intéressant de revenir trop souvent à la ligne. Ca me semble parfois inutile et sans intérêt, mais tu n'en abuses pas trop, ça va.