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  #1  
Vieux 31/10/2010, 21h29
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Thoor Thoor est déconnecté
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Thoor change la caisse du Fauve
Le défi de Novembre 2010 : un 31 octobre d'halloween et de vendanges...

31 octobre" avec, la possibilité de parler de vendange ou Halloween.

Citation:
LE DERNIER REMPART


« AAAAHHHOOUUUUUU ! », Le cri monte, enfle, s’élance par-dessus les toits, serpente entre les cañons de béton, cherche les oreilles qui peuvent l’entendre. Dans les appartements douillés, les Parisiens tout à coups sentent un frisson glacial s’élancer le long de leur colonne vertébrale. Une peur ancestrales les contraint à vérifier que les fenêtres sont bien fermées et que le verrou de leur porte blindée est bien mis. Les nourrissons se mettent à pleurer, des couples amoureux commencent à se disputer, les nerfs de chacun sont a vifs.

Son long museau pointé vers le ciel, la créature lance pour la dernière fois l’Appel dans le crépuscule rougeoyant de cette fin de journée d’octobre. Des lambeaux de nuages s’accrochent aux ultimes lueurs du jour, créant un ciel apocalyptique qui résonne à l’unisson de son désarroi et de sa peine. Elle ferme les yeux, priant quelques dieux impies que son Appel soit entendu.
« VIRAM TIED ! », Venez à moi mes frères !
« VIRAM TIEDAD ! », Venez à moi mes sœurs !
« VIRAM THANADOS DEFLAG ! » Venez nourrir de votre sang le Pacte.
« AAAAHHHOOUUUUUU ! » Elle laisse son cri mourir doucement dans le fond de sa gorge. C’est fini ! Personne ne lui répond. La créature, lentement, baisse la tête jusqu'à toucher le sol. Une larme perle, suivit de bien d’autres coulent au coin de ses yeux clos. Elle serre et desserre ses griffes, broyant le sol de pierre au rythme des sanglots qui secouent son corps massif. Les minutes s’écoulent, bien que la ville soit bruyante, elle n’entend que le silence et l’absence de réponse de ses pairs. Les éclairages publics s’illuminent alors que l’obscurité se fait plus présente. Les passants se font rares, il ne reste plus que les adolescents pressés de rejoindre les différentes fêtes d’Halloween.
La créature du haut de la flèche de Notre Dame, toise ces humains. Comme elle les méprise. Comme elle les hait dans le fond de son cœur. La tentation est bien grande de renoncer, de s’élancer dans la nuit, de leurs faire payer leur oubli, leur défaillance. Quel appétit de sang est le siens ce soir. Les humains ont faillis, ils n’ont pas respectés leur devoirs, ils ont oubliés.
Pour ne pas céder, elle étend ses larges ailes membraneuses et s’élance dans la nuit. De toute façon il est trop tard, la lune se lève. Le voile de la réalité se distend, prés à se rompre en cette nuit de la Toussaint.

Ses battements d’ailes rageurs l’éloignent des tréfonds du grand vaisseau de pierre ou repose désormais les siens. Elle fuit la vision macabre de ses congénères humiliés, de leurs cornes cassées, de leur queue auxquelles pendent des boites de conserves, des gueules entrouvertes transformées en cendrier, des graffitis obscènes maculant les majestueuses créatures.
Les larmes amères montent de nouveau alors quel rejoint son poste, a l’aplombe du monolithe de calcaire de la fameuse place de la Concorde. C’est de la que viendra l’attaque, c’est là qu’apparaitra Samai et ses hordes démoniaques. C’est là que la Gargouille, pour la dernière fois combattra, protégeant les fragiles humains. Elle ne renoncera pas, ne brisera pas le Pacte, elle sera : le dernier rempart.
Un tout petit texte pour une relance des défis des 'Plumeux'

Bonne lecture à tous
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  #2  
Vieux 31/10/2010, 22h34
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Hilarion Hilarion est déconnecté
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Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !Hilarion est LA légende vivante de ce forum !
Belle intro, jolie ambiance, mais on veut la suite!

Je suis nostalgique des "Gargoyles"!
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  #3  
Vieux 31/10/2010, 22h38
Avatar de beldarien
beldarien beldarien est déconnecté
ha londres, c'est beau!!!
 
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beldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobobeldarien a plus de poils sous les bras que Lobo

simple mais efficace

mais pareil que halna' on veut la suite!!!!
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Citation:
larfleeze: "i want a forest of christmas threes! whatever those are!


MO-BI-LI-ZEZ VOUS!!! Buzzthon 2010-2011
mes ventes sont ici...
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et mes recherches sont la recherches
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  #4  
Vieux 31/10/2010, 22h55
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Ben Wawe Ben Wawe est déconnecté
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Ben Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à Galactus
Joli ! Inspiré par le dessin-animé Gargoyles, non ?
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  #5  
Vieux 31/10/2010, 23h45
Avatar de Thoor
Thoor Thoor est déconnecté
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Thoor change la caisse du Fauve
Sans vergogne je l'avoue, le dessin animé fut mon inspiration.

Pour la suite.......... j'y réfléchit



Et vous savez quoi: cette nuit j'ai eu la révélation, je connais la suite...... YAPLUSKA
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Dernière modification par Thoor ; 01/11/2010 à 10h08.
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  #6  
Vieux 02/11/2010, 21h07
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Ben Wawe Ben Wawe est déconnecté
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Si Thoor a fait court, j'ai fait très long...
J'ai été inspiré par les thèmes. Bonne lecture aux courageux.

Un petit coin de paradis
1er novembre 2010


« Alors… voilà. Tu peux ouvrir les yeux, maintenant.
- C’est vrai ? C’est bon ?
- Oui, oui. Vas-y. »

Dora cligna les paupières pour s’habituer à la lumière du soleil, déjà haut dans le ciel. Ses yeux se posèrent sur les deux petites collines vertes qui lui faisaient face, avec au loin la silhouette de la maison blanche de style colonial, le champ des vagues se heurtant au sable derrière elle accompagnant sa vision. Une petite dizaine d’hommes et de femmes s’employaient à mettre en place plusieurs plants de vignes assez jeunes, selon un schéma carré et géométrique indiqué par des petits poteaux placés régulièrement.
Ils n’en étaient encore qu’au début mais tout prenait déjà forme, et elle n’avait pas de mal à imaginer ce que ferait le domaine quand tout serait terminé.

« Qu’est-ce que t’en penses ? »

Après de longues secondes à fixer encore les camions et leurs remorques qui avançaient difficilement dans les tranchées, et plus loin la grande maison blanche qui appartenait depuis des générations à la famille de Stuart, elle se tourna et sourit. Il était beau, avec ses cheveux longs châtains, ses yeux noisette et son petit sourire en coin, et se fondait très bien dans le paysage.

« C’est… c’est merveilleux.
- Tu trouves ?
- Oui… c’est vraiment superbe. Je suis sûre que ça va être parfait. »

Son mari sourit aussi, mettant sa main au-dessus de ses yeux pour les protéger du soleil. Il était fatigué, son jeans était recouvert de tâches de terre et son t-shirt était maculé de transpiration, mais il était heureux. Ca faisait des jours qu’il travaillait ici, jour et nuit, pour tout mettre en ordre, pour tout préparer en espérant que ça lui plairait. Et que ça fonctionnerait, aussi. Il n’avait pas le choix, de toute façon.

« Merci… ton avis compte, tu sais.
- Je sais. C’est… c’est vraiment énorme. J’avais jamais vu que le domaine était aussi… grand.
- Ouais. Ca m’a fait pareil, mais c’est parce que la plus grosse partie était sous les mauvaises herbes et les arbres.
- Je vois. Tes parents ont jamais pensé à en faire quelque chose ?
- Nan… et je crois que personne dans la famille a jamais voulu, en fait. La propriété a mauvaise réputation chez nous depuis plus d’une centaine d’années.
- Pourquoi ?
- Je sais pas… apparemment, Joshua Anderson, mon aïeul qui a acheté le domaine, avait un projet économique qui a pas fonctionné. Du tout. Ca l’a mené au suicide et sa femme Louise a été internée après qu’il l’ait torturé, ou quelque chose comme ça.
- C’est terrible…
- Oui, je sais. Depuis, il y a une sorte de répulsion dans la famille pour la propriété : personne veut y vivre, personne veut y venir.
- Sauf toi.
- Sauf moi, oui. Je… écoute, je sais que mon idée est folle. Je veux dire, on est en Virginie, près de la mer, et installer des vignes ici, c’est presque de la folie. Mais… oui, je sais que ça a pas toujours fonctionné dans cet Etat, mais je suis sûr que ça a du potentiel. La Virginie avait quand même mentionné dans sa charte fondatrice la fabrication de vin comme un objectif primordial, et même le Président Jefferson a tenté plusieurs expériences dans son domaine de Monticello, qui est pas si loin d’ici ! Je… je suis sûr que ça peut fonctionner. Je… je vais en faire notre petit coin de paradis, Dora.
- Je sais. Je te fais confiance. »

Dora posa sa main sur l’épaule de son mari. Il était exténué. Il avait tenu à la mettre à l’écart à cause de sa santé mais elle savait que c’était pour éviter qu’elle porte elle aussi la pression du projet. Il voulait jouer au héros en prenant tout sur ses épaules, mais c’était trop pour lui.
Depuis la mort de ses parents, Stuart avait hérité de la propriété… et c’était à peu près tout. Il avait toujours cru que sa famille était riche et lui donnerait les moyens de monter ses propres projets quand il serait son dernier représentant, mais la chute avait été rude. Beaucoup de dettes s’étaient accumulées depuis plusieurs générations et les payer avait quasiment vidé tout l’héritage. Seuls étaient restés le domaine et quelques milliers de dollars, juste assez pour débuter un projet… et croiser les doigts pour qu’il fonctionne.

« Merci. Dès… dès que je suis venu ici, après la mort de mes parents, j’ai su que je pouvais faire quelque chose de cet endroit. C’est… c’est comme si l’idée était montée en moi, avait jailli en moi. La propriété m’a inspiré, en fait. »

Stuart lui fit le petit sourire de gamin qui la faisait craquer et elle le serra contre sa poitrine. Au fond, cet homme de trente ans était encore un enfant qui espérait ne pas faire d’erreur en se lançant dans un exercice difficile, sans que ses parents soient là pour le corriger cette fois-ci.
Elle aurait voulu lui apporter les connaissances et l’expérience qui lui manquaient, mais elle n’était qu’une petite secrétaire de direction et ne pouvait que gérer le côté administratif de la société. C’était à Stuart et à Stuart seul qu’il revenait de transformer un domaine en friche en une belle exploitation viticole. Et même si le vin était en vogue aux Etats-Unis, Dora savait bien que c’était dangereux, alors que le pays se remettait difficilement et que son mari était totalement novice dans ce domaine.

Il croyait dur comme fer que la propriété « maudite » de sa famille ferait une parfaite exploitation viticole. Ce n’était pas forcément idiot, mais il s’était lancé là-dedans sans étude de marché, sans analyse professionnelle, sans véritables conseils de viticulteurs importants. Dora avait bien essayé de calmer ses ardeurs, mais il n’avait pas voulu écouter et elle n’avait pas eu la force de lutter. Et il pouvait très bien réussir, après tout.

« Tu vois, je suis sûr que ces plants de vigne française pousseront très bien.
- Il y a que des vignes françaises ?
- Non, on ajoute aussi des vignes locales, tirées de l’intérieur des terres.
- Elles donnent quelque chose ?
- Non… enfin, on sait pas vraiment, on a jamais essayé.
- D’accord.
- Mais ça marchera. J’en suis sûr.
- Mais moi aussi.
- Tu… tu vas bien ? Avec tout ça, je prends pas assez soin de toi. T’as pas trop chaud ? Tu veux boire quelque chose ?
- Ca va. Promis.
- Je veux pas te mettre en danger. On va rentrer dans la maison… notre nouveau chez-nous !
- Tout est fini, là-dedans ?
- Oui, ça a été ma priorité. Je veux pouvoir installer au mieux ma petite famille ! »

Dora sourit, posant sa main sur son ventre arrondit de quatre mois. Elle était pâle et fatiguée, mais elle voulait faire plaisir à Stuart en le suivant dans la visite de la propriété. La grossesse se passait mal, et son mari ne connaissait pas toutes les inquiétudes de son gynécologue. Apparemment, son utérus n’était pas assez grand pour accueillir leur enfant et chaque sortie, chaque choc était un danger pour le bébé. Et pour elle.
S’il savait ça, Stuart n’aurait jamais voulu qu’elle quitte le lit et l’appartement qu’ils venaient de vendre pour faciliter l’entreprise de son mari, mais c’était hors de question pour Dora. Elle était tombée amoureuse d’un « riche » héritier stagiaire dans son entreprise, un peu rêveur et paumé selon ce qu’on disait de lui, et s’était mariée avec un adulescent qui se lançait dans une entreprise folle avec pour seule arme son envie de réussir. Et voilà qu’ils allaient avoir un enfant et qu’elle devait arrêter de travailler pour… survivre, tout simplement.

C’était dur, mais ce qui l’était encore plus c’était de devoir garder tout ça en elle pour que Stuart ne craque pas. Ses parents s’étaient éteints quasiment ensemble, quelques années après les décès des autres membres du « clan Anderson ». Une famille d’optimistes et de rêveurs, qui perdaient trop rapidement l’argent qu’ils gagnaient. Une famille qui aimait l’image et avait peur de cette propriété, sa nouvelle maison.

Une famille qui n’avait jamais fait confiance à Stuart alors qu’elle savait qu’il était capable de grandes choses. Une famille qui se trompait, finalement.
Elle était sûre que son mari le lui prouverait et qu’il transformerait son idée folle en belle réussite. Elle l’aiderait pour ça. Elle se tairait pour ça.

***

« Stuart… qu’est-ce que tu fais ?
- A ton avis ? Je glande ? Je bosse, putain.
- Je… ok, d’accord. Calme-toi.
- Me calmer ? Tu me demandes de me calmer ? »

Stuart regardait Dora avec fureur. Il avait coupé les cheveux longs châtains qui lui avaient tant plu deux ans plus tôt et préférait maintenant une coupe beaucoup plus courte, presque militaire. Sa barbe n’était plus taillée régulièrement et c’était une torture pour sa femme de l’embrasser, de se coller à cet amoncellement de poils durs et piquants. Ses habits étaient toujours sales et l’hygiène n’était plus qu’un vague concept, pour lui.
Il passait ses journées à travailler et ne dormait au mieux que quelques heures. Il était devenu impossible à supporter et s’en fichait. C’était Dora qui devait tout encaisser et garder le sourire. Chaque journée était plus dure que la précédente.

« Je bosse, merde. J’ai du boulot, pour te nourrir et nourrir Ryan.
- Ryan a aussi besoin de son père.
- Qu’il classe les priorités : je pense pas qu’il veuille passer du temps collé à moi s’il crève de faim.
- Stuart ! Pas devant lui ! »

Dora tenait contre elle leur enfant, qui n’avait que quelques semaines et dormait contre son sein. Elle était uniquement vêtue de son grand peignoir mauve et ses cheveux étaient coiffés dans un chignon un peu gauche. Elle se trouvait sous la véranda de leur grande maison blanche, qui comptait bien trop de pièces et était bien trop froide pour eux. Ils chauffaient très peu et ça l’affaiblissait encore plus.
Elle n’aimait pas l’endroit à cause de cette impression de grandeur, parce qu’elle n’avait le sentiment que d’être un grain de sable sur une plage immense.

« Quoi ? Il entend rien, c’est bon ! Il fait que dormir, de toute façon.
- Stuart… il est déjà tard.
- Le boulot est pas fini.
- Stuart…
- Ouais, ouais. J’y retourne.
- Il pleut des cordes !
- Ouais. »

Stuart posa son regard sur le domaine, obscurcit par la nuit et souffrant des trombes d’eau violentes. Au loin, une petite chaumière construite à la hâte quelques mois plus tôt était visible par les lumières qui apparaissaient aux fenêtres. C’était un atelier, un carré de béton avec un toit plat et une porte en bois. Ca n’était sûrement pas suffisant pour stocker et mettre en bouteilles le vin, mais c’était tout ce qu’ils avaient pour le moment.

« Mais j’ai du boulot.
- Ecoute, tu vas tomber malade et…
- J’ai du boulot ! On doit préparer les premières bouteilles, merde !
- Mais… mais c’est même pas ta cuvée ! C’est même pas le résultat de tes propres vignes !
- Tu crois que je le sais pas ?! »

Il se tourna vers Dora, qui recula en voyant son expression de fureur. Elle avait peur, un sentiment qu’elle ne connaissait que trop bien depuis leur arrivée ici. Elle commençait à s’y habituer ; ça la terrifiait encore plus.

« Je sais bien que ça va mettre encore des mois pour que les vignes soient bonnes, et encore, si cette foutue pluie s’arrête enfin ! Je sais bien que j’aurais jamais dû planter les vignes fin mars et début avril et demander des conseils à la place, mais je savais pas, merde ! Alors arrête de me critiquer et laisse-moi me tuer au boulot pour que toi et Ryan puissiez bouffer tranquillement et dormir toute la journée !
- Tu… tu crois peut-être que je suis contente de ça ? Que je suis contente de pas pouvoir me lever le matin ? Que ça me va d’avoir perdu ma résistance et ma santé ?!
- Ouais, ouais… ça va, laisse-moi bosser… »

Stuart dévala les escaliers de la maison et s’enfonça dans l’obscurité, rapidement recouvert par une pluie dévastatrice qui le fit disparaître quelques instants plus tard. Dora s’emmitoufla plus dans son peignoir et recula. Elle avait besoin de s’asseoir pour reprendre ses forces et pour se rappeler encore une fois pourquoi elle aimait son mari.

***

Dora fut réveillée en sursaut par la sonnerie du téléphone. Elle se leva difficilement du canapé où elle s’était endormie pour le décrocher et répondre d’une voix empâtée. Elle n’avait pas bien dormi, toujours inquiète pour Stuart malgré la façon dont il la traitait et était surtout régulièrement réveillée par des hordes de gamins déguisés. Ils étaient insupportables.

« Moui… ?
- Dora, viens à l’atelier. Maintenant.
- Hein ? Stuart, c’est toi ?
- Ouais. Viens, maintenant.
- Mais… attends, il est quelle heure ? Stuart… il est trois heures du matin !
- Ah ouais ? Pas grave, j’ai besoin de toi.
- Mais… il est tard, beaucoup trop tard…
- Je m’en fous ! Tous… tous ces foutus employés sont partis ! Ces foutus lâcheurs !
- Mais il est trop tard ! Tu pourras même pas payer leurs heures supplémentaires !
- Ouais, surtout si je peux pas finir de mettre en bouteilles ce foutu vin ! Alors tu viens et tu m’aides, et c’est tout !
- Mais…
- Tu viens !!! »

Stuart raccrocha et laissa Dora dans l’incompréhension et la lassitude. Elle était morte de fatigue, mais heureusement la sonnerie n’avait pas réveillé Ryan, qui l’épuisait aussi par ses réveils beaucoup trop irréguliers. Sa vie de couple était une catastrophe, son enfant lui portait sur les nerfs et sa santé était encore plus en danger que pendant sa grossesse. Sortir dans le froid et la pluie ne feraient qu’empirer son état, et ça serait bien stupide d’obéir ainsi à son mari. Il la trait comme une bonniche, une esclave… il n’avait plus aucun respect pour elle.
Elle se surprit quand même à s’habiller plus chaudement et à se diriger vers l’atelier.

***

« Mais tu sers vraiment à rien !
- Mais… je fais pas… bien… ? »

Ca faisait une demi-heure que Dora essayait de mettre en bouteille le vin qui se trouvait dans les deux cuves que Stuart avait acheté à un domaine voisin.
Encore une fois, il ne savait pas vraiment si c’était une bonne idée de mettre en bouteille à cette date de l’année, ou quelles étaient les méthodes à suivre et les mesures d’hygiène à respecter. Encore une fois, il improvisait et s’énervait de sa propre ignorance, mais il préférait mourir plutôt que d’accepter ses fautes. Et passait ses nerfs sur les autres pour compenser.

« Nan ! Nan, bien sûr que nan ! Tu fais rien de bien ! »

Il la poussa violemment par un coup d’épaule et plaça différemment la bouteille sous le robinet de la cuve, mais il avait mal agi et quand il alluma le robinet, beaucoup du précieux liquide coula sur le côté, tâchant ses habits et s’écoulant sur le sol. Stuart laissa alors tomber la bouteille, qui s’écrasa dans un bruit aigu, rapidement suivi par le cri de terreur de Dora.
Il se dépêcha de fermer le robinet et posa alors un regard fixe sur le vin au sol. Il n’y en avait pas beaucoup, mais chaque goutte était inestimable vu leur situation. Stuart avait pensé que c’était une bonne idée de racheter à bas prix un peu de vin chez des « collègues », pour appâter le client avec une première cuvée peu chère et de promotion. Même s’il n’avait encore rien sorti, il savait que ça serait une catastrophe : les vins achetés étaient à peine buvables, et il était même en retard pour la sortie de ces crues « transférés ».

Au loin, un animal se mit à hurler. Dora frissonna.

« Stu… Stuart… ?
- C’est de ta faute.
- Qu… quoi ?
- Tout ça. C’est de ta faute. »

Son mari continuait de fixer le sol en parlant. Ca ne le rendait que plus terrifiant aux yeux de Dora, qui reculait sans s’en rendre compte.

« Mais… mais…
- Si t’étais pas tombée enceinte… si t’avais pas été si faible… j’aurais jamais repris ce domaine. Je l’aurais vendu et je me serais tiré. Je t’aurais laissé avec le gosse et je me serais enfui. Comme avec Marylin.
- Mais… de… de quoi tu parles ? »

Elle sentait les larmes couler silencieusement le long de ses joues. Elle n’osait pas comprendre. A nouveau, elle entendit la bête hurler. Il n’y avait pourtant pas de chiens errants, dans la région.

« Arrête, tu t’en es jamais doutée ? Je suis un lâche, j’ai peur de jamais réussir ce que je fais et je préfère fuir que d’assumer mes responsabilités. Là, j’ai fait ça uniquement parce que je pouvais pas partir en te laissant aussi malade… je pensais que tu survivrais pas à l’accouchement, en fait. Tout ça, le domaine, l’exploitation… j’ai improvisé, j’ai voulu te créer un petit rêve douillet avant l’accouchement pour que tu puisses partir heureuse, croyant que je m’occuperai bien du gamin… s’il survivait. J’avoue, j’ai espéré que non, mais bon… mais bon, rien a fonctionné comme je le voulais. Comme d’habitude.
- Tu… tu es un monstre…
- Non. C’est toi. »

Le vent redoubla d’intensité, dehors. La maison au loin était invisible et aucune lumière n’était visible à l’extérieur. Dora avait l’impression de se découvrir emprisonnée, et les paroles de son mari ne faisaient qu’accentuer ce sentiment.

« Tu manges, tu te reposes, tu t’occupes de Ryan. Tu fais rien d’autre alors que je me tue à la tâche. Tu te dis compréhensive, mais chaque fois que je te regarde je sens bien ton regard accusateur. Je fais tout et toi tu fous rien. T’es bien comme eux… comme les autres, là, qui font rien pour m’aider. »

La porte de l’atelier claqua derrière Dora à cause du vent. Elle sentit son cœur battre encore plus fort et des tâches noires apparurent devant ses yeux. Elle se sentait mal.

« Ils travaillent à peine, le minimum du minimum, juste ce qu’il faut pour être à peine fatigués et payés. Vous me regardez m’exténuer, mais vous ne faites rien pour m’aider. Vous me regardez essayer et perdre, et vous ne faites rien pour m’aider. Vous voulez me voir faillir. Vous voulez rire de moi. »

La porte en bois ne cessait de s’ouvrir et de se fermer dans un rythme frénétique.

« Vous n’avez jamais cru en moi, aucun d’entre vous. Ni mes parents, ni mes oncles, ni mes cousins. Vous pensez tous qu’acheter cette propriété était une erreur et que rien de bon ne sera tiré de cette terre. Vous pensez tous que je ne suis pas digne de votre attention et de votre soutien, mais vous vous trompez. »

Elle ne comprenait plus rien à ce qu’il disait. Elle voulait juste partir, prendre Ryan et se trouver loin de lui. Elle se colla contre le mur de l’atelier, haletante.

« Je sais ce que je fais. Même si les fruits de mon travail ne seront pas visibles avant quelques années, je continuerai. Tu entends, Louise ? Je continuerai. Et je n’accepterai plus que tu me remettes en question, spécialement devant les esclaves. J’appelais le domaine notre petit coin de paradis, n’est-ce pas ? Et bien il le restera, même si tu ne veux pas y participer ! Il sera le mien, uniquement le mien !
- Mais… mais…
- Suffit, femme ! Tu es mon épouse et je ne veux plus que tu leur parles. Je suis persuadé que leur rébellion vient de toi. Tu veux ma ruine, je le sais. Tu ne m’as jamais aimé et tu n’acceptes pas notre mariage, soit. Mais je ne puis accepter que tu pousses nos esclaves à la révolte. Des mesures ont été prises pour châtier les coupables, d’ailleurs. Dès demain, ils seront fouettés jusqu’au sang dans les champs, devant les leurs.
- Stuart… c’est de la folie…
- Stuart ? »

Son mari releva les yeux pour la première fois. Ils étaient bleus. Elle se mit à crier alors qu’il avançait vers elle.

« Il n’est pas ici, catin. Je me doutais bien qu’en plus de pousser mes esclaves à la révolte, tu te complaisais dans le déshonneur et… et le métissage. C’est répugnant. Je ne puis évidemment le supporter, traînée. Toi aussi, tu dois être punie pour cela. »

En quelques enjambées, il fut devant elle et Dora reçut la plus violente claque de sa vie. Elle tomba lourdement au sol, et sentit des nausées monter dans sa gorge. Elle vomit sur le sol, le liquide se liant au vin gâché quelques mètres plus loin. Stuart recula et la regarda d’un air dégoûté.

« J’aimerais penser que c’est le dégoût de toi, la conscience de ce que tu as fait qui s’exprime, mais je me leurrerai sur toi. Debout, catin. Debout ! »

Dora rouvrit les yeux. Elle n’était qu’à quelques centimètres de la porte et pouvait la toucher, mais Stuart ne la laisserait pas faire. Elle crut voir des lumières dans les vignes, mais ça devait être son état qui lui faisait imaginer des choses. Un espoir. Inutile.
Stuart lui prit la main et la força à se lever et à le regarder. Ses yeux étaient fous, et toujours aussi bleus.

« Même si le coton ne me rapportera pas l’argent que j’espère, il est hors de question que tu continues à me déshonorer de la sorte. Demain, ton Stuart sera fouetté jusqu’à la mort et tu regarderas ! Et tu passeras les jours d’après à veiller son cadavre, et tous ceux de ses camarades de rébellion ! Il est temps que la propriété Anderson sache qui est le véritable maître, ici ! JE suis le maître, Louise !
- Mais… Stuart… pitié… c’est moi… Dora…
- Tais-toi, catin ! JE commande en ces terres, JE suis le seigneur et maître !
- Plus maintenant, m’sieur Joshua.
- Hein ?! »

Stuart se tourna vers la porte… et blêmit. Dora, pleurante, haletante, ayant du mal à trouver sa respiration, fut lâchée par son mari et retomba au sol. Elle utilisa ses dernières forces pour regarder vers l’extérieur, et découvrit terrifiée une demi-douzaine de grands noirs, musclés et en haillons, dignes des téléfilms sur la guerre de Sécession. Ils semblaient fatigués, leurs yeux étaient exorbités et surtout leurs flancs et leurs jambes étaient recouverts de sang. Elle n’avait même plus la force de crier.

« Stuart… retourne dans ta case ! Tu seras puni demain !
- M’sieur Joshua…
- Je ne t’ai pas donné la parole ! Sors d’ici ! C’est entre ma femme et moi, cela ne concerne pas les animaux que vous êtes !
- Nous n’sommes plus des animaux, m’sieur Joshua. On a gagné et vous avez perdu d’puis longtemps. Et c’est pas m’dame Louise… l’est morte il y a bien longtemps.
- Quoi ?! Tu délires, Stuart ! Tu seras doublement puni pour ça !
- J’ai d’jà été puni, m’sieur Joshua. Et doublement puni en sachant comment z’avez rendu m’dame Louise folle en la forçant. Ca fait trop longtemps qu’on vous cherche, m’sieur Joshua. Il est temps de partir, la nuit finit… et on vous ramène avec nous. Not’nuit s’finit.
- Stuart, tu… tu… tu paieras pour ça ! Tu… tu… »

Dora n’en entendit pas plus. Elle s’effondra sous le coup de la fatigue, de la douleur et de la folie ambiante. Elle se réveillerait le lendemain matin, seule. Définitivement.

***

« Et voilà, Sally… tu peux ouvrir les yeux.
- Ok. Je… wow ! C’est impressionnant ! Et bien conservé !
- Oui. Si on enlève les mauvaises herbes et les arbres inutiles, je pourrais en faire ce que je veux. Et j’ai déjà des idées !
- Ah oui ?
- Ouais ! J’ai… bon, c’est un peu fou hein, mais j’aimerais bien faire pousser des légumes écologiques, ici. Faire une ferme écolo, ça serait assez innovant dans la région et ça me ferait un super marché. Je suis sûr qu’il y a du potentiel.
- Je… oui, sûrement. Mais… comment t’as pensé à ça ? Je t’ai jamais connu écolo, hein !
- Ouais… je sais. Mais, depuis que maman est morte le mois dernier à… à l’asile, et que je suis venu ici, c’est… c’est comme si j’avais été inspiré. Je sais que je peux en faire quelque chose. Quelque chose de bien, de grand.
- J’en suis sûre. J’ai foi en toi, Ryan. Je serai là pour t’aider.
- Merci. J’en doutais pas. On va se faire notre petit coin de paradis, ici. Rien qu’à nous. »
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  #7  
Vieux 03/11/2010, 14h23
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Wahou, excellent texte, bravo
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  #8  
Vieux 05/11/2010, 00h09
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Ben Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à GalactusBen Wawe met la patée à Galactus
Merci, courageux.
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  #9  
Vieux 14/11/2010, 17h48
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Je poste et je vous lis, les amis.


Citation:
L'homme reposa son verre de vin sur la table et jeta un coup d'oeil sur la pendule. Il grogna, se leva et alla se poster sur le côté de la fenêtre pour regarder en coin la route serpentine. Au plus loin qu'il regardait, il ne distinguait personne sur le chemin de graviers qui montait en pente douce vers la colline. Il se déporta légèrement, posa son front sur la vitre glacée pour se consoler avec le spectacle de ses vignes. Dans le soleil couchant rouge et or, et avec ce léger givre pailleté, les derniers grains de raisins luisaient en constellations étrangères sur les coteaux en espalier et c'était à couper le souffle. Il jeta un dernier regard en coin vers la route et retourna s'asseoir. Il vida son verre d'un trait.


L'enfant savait qu'il n'aurait jamais du prendre la route tout seul. Mais Béber et Toine n'avaient pas eu l'autorisation de sortie et il était hors de question que l'enfant loupe cette soirée. Comme d'habitude, il avait embrassé ses parents, avait fait mine de se laver les dents en laissant couler l'eau tiède trois minutes dans la vasque, avait crié une dernière fois "bonsoir 'pa, bonsoir m'man!" du haut de l'escalier et était parti se coucher. Sauf qu'une fois dans sa chambre, ce n'était pas son pyjama qu'il avait enfilé. De dessous son lit, Il avait sorti son costume de monstre qu'il avait pris un soin maniaque à confectionner en cachette les jours précédents. Sûr que sa mère deviendrait folle et le battrait comme plâtre si elle voyait ce qu'il avait fait de ses habits en lin maintenant tout rapiécés au niveau des genoux et des coudes avec des pièces de tissus grossières, et aussi froissés que s'ils étaient passés plusieurs fois sous les roues d'un tracteur. Et c'était sans nul doute le sort qui l'attendrait lors du prochain dimanche de messe mais le futur n'existe pas à cet âge. Après avoir enfilé son déguisement, l'enfant avait passé du temps à se grimer avec du maquillage chipé dans la coiffeuse maternelle. Ses deux yeux cerclés d'un noir profond tranchaient avec la blancheur de mort de ses joues et son costume d'albâtre et il trouvait ça vraiment trop chouette et effrayant cette allure de clown des enfers. Après avoir passé de longues minutes à grimacer devant le miroir de son armoire dans des postures grandiloquentes, il avait éteint la lumière de sa veilleuse, le coeur gonflé d'une excitation inhabituelle. Aussi délicatement qu'un papillon, il avait ouvert sa fenêtre et s'était faufilé dehors en se laissant glisser le long de la gouttière. Direction la grand-route, les maisons cossues des riches, toutes ces friandises qui n'attendaient que lui.


L'ébriété avait commencé à rosir les joues de l'homme. Il tournait comme un lion en cage dans son salon semblant attendre quelque chose qu'il savait pourtant totalement vain. Les traditions se perdent, pensa-t-il et peut-être même prononça-t-il cette sentence à voix haute dans une exhalation vineuse. Toujours désertée, la route ne lui accorderait pas ce soir de divertissement à sa solitude. Les ouvriers avaient quitté son exploitation la veille et les derniers bruits de sécateurs résonnaient encore dans sa tête. La récolte avait été bonne. Son viognier promettait de belles vendanges tardives au goût onctueux de réglisse et d'abricot. Il résistait à l'envie de s'ouvrir une nouvelle bouteille. Il se sentait faible ce soir. La libération du bouchon de son goulot produisit le plus gouleyant des "pop". Il se versa un verre puis sortit son zippo de sa poche et commença à passer à la flamme le bouchon de liège brun.


L'inconvénient majeur de son déguisement c'était qu'il ne lui avait pas laissé la place d'enfiler un gros pull par dessous. En ce 31 octobre, les premiers frimas s'étaient abattus durement sur toute la région. L'enfant commençait à avoir très froid. En plus, il venait de finir le dernier crouton chipé dans la mangeoire des lapins. Il regardait son sac de bonbons avec les yeux d'une grenouille pour une princesse dédaigneuse. Mais pas question qu'il entama son trésor. Ah, ça! ils allaient être verts de rage demain à l'école les béber et les toine trop couards pour désobéir à leurs parents . Des réglisses, deux mistral, des macarons faits maison, une boite coco, tout un tas de lanières de guimauves multicolores. Il était le dernier pirate de la brume, le brigand super fortiche de ses rêves d'aventure. Avec un tel butin, c'était bien le diable si Anne De Réjean ne l'embrassait pas en échange de quelques sucreries. Il grelottait de plus en plus fort. Encore quelques maisons. Celle du médecin, ensuite celle du notaire. Et s'il lui restait assez de courage pour affronter les énormes molosses qui gardaient le domaine, la demeure du maire. La nuit était belle. Il ne regrettait pas sa fugue.


D'un geste sûr et précis qui lui sembla remonter de la nuit des temps, l'homme traça deux cercles parfaits autour de ses yeux. Deux anneaux gris charbonneux dont il peaufina les zones plus claires par quelques retouches au bouchon noirci . Là, ce n'était pas loin d'être parfait. Content de lui, l'homme prit un vieux pochon dans la cuisine ainsi que sa lampe torche. D'une légère tape sur la tête, il rassura son chien inquiet devant l'allure incongrue de son maître. Puis, il sortit dans la nuit dont le flux tranquille s'écoulait dans la campagne environnante, baignant les raisins épars d'une pâleur de cristal. Dieu, que la nuit est belle pensa-t-il en s'engageant dans les coteaux, un étincelant sourire de lune sur sa face de clown des enfers.
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  #10  
Vieux 14/11/2010, 20h51
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J'aime bien. L'idée du récit croisé est bon mais peut-être faudrait-il plus de lien entre les deux parties, et la fin n'a pas une révélation aussi forte que je l'espérais. Aussi, j'ai l'impression que le texte se passe en France, dans une vieille France au vu du vocabulaire utilisé et des indications sur les habitudes des personnages, mais je ne pense pas qu'Halloween ait été pratiqué il y a plus de trente ans. Ca m'a fait bizarre.
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  #11  
Vieux 15/11/2010, 16h17
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nonon
pour ma part, dans le centre profond on entend encore des expressions comme "la Réjanne de La(place de La)Rémond"
et pas que dans la bouche des vieux...
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Excusez mon humour de chiottes mais c'est parce que j'y mets tous les déchets de mes sentiments.
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  #12  
Vieux 22/11/2010, 15h01
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Bon texte, le destin croisé des deux personnages est bien traité, il ne me manque qu'un petit lien à la fin pour les liés et tout serai parfait.
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  #13  
Vieux 22/11/2010, 15h07
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Merci (promis, je vous lis avant la fin de la semaine)

Oui, Ben tu as raison, j'ai de suite vu l'anachronisme mais j'ai laissé filer... ta sagacité m'a tuer...

De toutes les manières, il faut croire que j'ai bien foiré ce texte parce que personne ne semble avoir réalisé, et c'est par conséquent de ma faute, qu'il ne s'agissait peut-être pas de deux personnages distincts...
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  #14  
Vieux 22/11/2010, 15h13
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C'était bien mon ressenti, mais du coup il manque le petit truc qui explique pourquoi cet homme bois et se souviens de cette histoire la en particulier.
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  #15  
Vieux 22/11/2010, 23h11
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Il manque une phrase-qui-tue à la fin, je trouve.
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