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Vieux 03/08/2018, 15h37
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Hawkguy
 
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La première saison de The Leftovers fonctionnait comme une entité suffisante, avec son début, son milieu et sa fin. Pourquoi continuer, lui écrire une suite ? Et comment ? A la première question, Damon Lindelof et Tom Perrotta avaient, semble-t-il, encore des choses à dire. A la seconde, ils le font en bouleversant tout, en entraînant leur saga dans une nouvelle direction - même s'il faut avoir vu les dix premiers épisodes pour le comprendre. Mais au final, ce deuxième acte est aussi passionnant que le premier.


Sertie d'un nouveau (et plus beau) générique accompagné d'une rengaine country entraînante, cette saison 2 s'ouvre par une incroyable séquence préhistorique dont le sens ne tarde pas à se révéler : le destin tragique de cette femme caverne et de son bébé résume la relation des parents et de leurs enfants au coeur de l'histoire développée dans les dix épisodes suivants.

En se délocalisant, The Leftovers se réinvente tout en continuant à creuser ses thèmes initiaux. Le "Jour du Grand Départ" hante aussi Miracle, ce parc naturel où a été bâtie la ville de Jarden, épargné par les disparitions du 14 Octobre trois auparavant. En apparence seulement, l'endroit est tranquille, préservé, mais derrière cette façade, on fait vite connaissance avec les Murphy, dont chacun des quatre membres souffrent de maux particuliers - un père rongé par une sourde colère (qui ne croit pas aux miracles), une mère sourde, une fille épileptique, un fils tiraillé entre la religion et les tours de son grand-père. Il y a quelque chose de pourri au royaume de Miracle, pour paraphraser Shakespeare...


Ce malaise est vite perçu par les Garvey, famille recomposée quand ils arrivent à Jarden. Eux-mêmes ont fui Mapleton, dans l'espoir de laisser derrière eux leurs fantômes et leurs démons, mais c'est une course en avant, une fausse solution dont ils prennent conscience progressivement. Kevin est sujet à des crises de somnambulisme, puis en proie à des hallucinations : épisode psychotique (comme le diagnostiquera Laurie) ? Ou possession mystique ? Nora, pour s'installer ici, a vendu sa maison de Mapleton à des scientifiques qui voulaient l'analyser comme théâtre de disparitions, et plus tard elle entend qu'on l'accuse d'être peut-être responsable de la perte de sa famille sur la base d'une théorie absurde.

Damon Lindelof et Tom Perrotta entretiennent le doute sur ce dernier point car, à peine les Garvey domiciliés à Jarden, des séismes ont lieu. Il y en a eu avant eux, mais le dernier coïncide avec la disparition de trois adolescentes : un nouveau "Grand Départ" aurait-il lieu ? On apprendra, lors d'un extraordinaire coup de théâtre dans l'avant-dernier épisode, que la vérité est littéralement ailleurs, et l'événement prend un tour sidérant que personne n'a vu venir - une prouesse scénaristique.

Les auteurs ont eu à coeur de surprendre, quitte à le perdre (comme en attestera l'audience en chute libre), le public en osant renouveler la narration d'ensemble. Dans la première saison, la série alternait épisodes "story's driven" et "Character's driven" (soit, en bon français, des épisodes où primaient tour à tour l'intrigue ou un personnage en particulier). Cette fois, chaque chapitre se focalise sur un protagoniste, osant des retours en arrière parfois conséquent, ou des déplacements dans des espaces inattendus (on visite même l'au-delà dans deux volets à l'humour noir déroutant à souhait). Cette construction est parfois frustrante car elle diffère des explications, mais aussi stimulante en donnant plusieurs points de vue à une même séquence (comme la première nuit à Jarden des Garvey et le séisme qui assèche le lac et correspond à la disparition des trois filles).

Revenons au générique : on s'étonne longtemps du crédit accordé à des acteurs comme Amy Brenneman, Chris Zylka et Liv Tyler alors qu'ils ne sont les vedettes que d'un épisode ou figurent dans quelques autres. Mais la qualité de leurs prestations et l'importance de leur rôle dans la machination au centre de l'affaire de la disparition ou dans la recomposition de la famille Garvey se justifient finalement, procédant de la structure du récit (où tout se met en place lentement mais sûrement).

Le reste du casting est dominé par, d'un côté, le couple Justin Theroux (plus fébrile que jamais)-Carrie Coon (superbe de détermination, lumineuse dans le tumulte) et, de l'autre, Kevin Carroll (bouillonnant)-Regina King (altière). On retrouve Ann Dowd dans une partition fantomatique irrésistible et Christopher Eccleston (littéralement illuminé). Plus en retrait, Margaret Qualley souffre davantage de l'expansion de la distribution.

Malgré le désordre dans lequel se trouve Jarden (résumé éloquent d'un Paradis envahi par des aspirants au miracle ou au chaos) et des rebondissements excentriques (preuve de la liberté totale des narrateurs, détachés de la contrainte de plaire au public), c'est encore sur une note d'espoir que se ferme cette saison 2. The Leftovers aura droit à une saison supplémentaire pour conclure définitivement, mais en seulement huit épisodes - ce qui ne saurait être un handicap pour une série qui puise sa force dans sa capacité à exploser les limites. Pour "ceux qui restent", en effet, le déluge est moins important que l'arche, ce qu'il reste à raconter est moins difficile que le temps imparti pour le faire.
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