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Qu'il soit de droite et réac', bon, ça me dérange car ce n'est pas ma tasse de thé idéologique, mais bon, je peux m'en accommoder car je ne lis pas forcèment des auteurs dont je partage les convictions (d'ailleurs, souvent, je ne sais pas de quel bord ils sont).
Mais ce que je trouve dommage avec Miller, c'est qu'il a été un formidable narrateur, un conteur, et sa force littéraire l'emportait sur ses idées politiques. On peut apprécier Batman Year One car ce qu'il pense n'envahit pas le champ de la lecture, ça reste divertissant, très efficace, admirablement déroulé. C'est vraiment brillant, l'écriture est ciselée. C'était encore l'héritier d'une école de la série noire, un virtuose chez qui on pouvait trouver aussi bien un plaisir au premier degré (de très bonnes bédés) que des allusions sur la société, un regard sans complaisance mais sans excés non plus.
Maintenant, à cause de ses prises de position, son style est complètement pollué. On ne peut plus le lire paisiblement, de façon détaché, on sait que c'est l'oeuvre d'un type dont les idées sont (au mieux) discutables, dont les motivations semblent plus idéologiques qu'artistiques. C'est, à mon sens, la limite d'un artiste. On est plus dans le pamphlet, la provocation, et c'est tout un art.
Quand je lis Alan Moore, Terry Moore, David Mazzucchelli ou Brian K. Vaughan (pour citer quatre narrateurs exceptionnels, du niveau qu'a eu Miller quand je l'aimais), leurs ouvrages ne sont pas parasités par leurs positions politiques.
Une grande bédé politique, c'est Pride of Baghdad de BKV et Henrichon, par exemple : une grande richesse, de l'intelligence, de l'émotion, et une esthétique incroyable. |
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